La résistance aux antimicrobiens, un défis pour la santé mondiale.
La résistance aux antimicrobiens au centre de la troisième conférence mondiale sur le phénomène s’est achevée à Mascate (Oman) le 25 novembre dernier. Les participants à cette conférence ont abordé pour la première fois les cibles destinées à relever le défi mondial que représente la résistance aux antimicrobiens (RAM). Cette conférence et ses cibles chiffrées concernant l’utilisation des antimicrobiens dans les secteurs de la santé humaine et animale ouvriront la voie à des engagements politiques audacieux lors de la prochaine réunion de haut niveau de l’Assemblée générale des Nations Unies sur la résistance aux antimicrobiens, qui doit se tenir en 2024.
A cette conférence, le manifeste ministériel de Mascate qui énonce les trois cibles à atteindre à l’échelle mondiale a été adopté. Il s’agit de réduire la quantité totale d’antimicrobiens utilisés dans les systèmes agroalimentaires d’au moins 30 à 50 % d’ici à 2030, intensifiant ainsi les efforts à l’échelle nationale et mondiale, de réserver les antimicrobiens d’importance critique en médecine humaine en mettant fin à l’utilisation d’antimicrobiens d’importance médicale pour stimuler la croissance chez les animaux et de veiller à ce que les antibiotiques dont l’accessibilité est essentielle (une catégorie d’antibiotiques abordables, sûrs et présentant un faible risque de RAM) représentent au moins 60 % de la consommation globale d’antibiotiques chez l’humain d’ici à 2030.
Les objectifs convenus à l’échelle mondiale seront essentiels pour protéger l’efficacité des antimicrobiens et freiner le développement de la RAM dans le monde, de même que pour réduire la pollution, ce qui selon les participants aura pour effet de limiter la propagation de la RAM.
Les pays se sont également engagés à mettre en œuvre des plans d’action nationaux de lutte contre la RAM et à renforcer la surveillance grâce à une amélioration de la communication et de la gestion des données, à la participation du secteur privé et à la mise en œuvre de pratiques fondées sur des données probantes.
Dans un communiqué, l’Alliance quadripartite, constituée de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et de l’Organisation mondiale de la santé animale (OMSA), s’est félicitée des résultats de la Conférence en matière de lutte contre la RAM.
Selon l’alliance, certes, la pandémie de COVID-19 a freiné les efforts mondiaux de lutte contre la RAM, mais elle a également démontré les liens essentiels entre les humains, les animaux et l’écosystème. Un éventail d’intervenants issus notamment des secteurs pharmaceutique, vétérinaire, des soins de santé, de la sécurité sanitaire des aliments, de l’agriculture et de l’environnement ont la responsabilité partagée de continuer à lutter collectivement contre la RAM.
« La FAO reconnaît combien il est important de réduire la nécessité de recourir aux antimicrobiens dans les exploitations agricoles et lancera bientôt une initiative mondiale sur 10 ans pour fournir un appui exhaustif aux Membres en mettant l’accent sur la transformation des systèmes agroalimentaires afin de contribuer à cette réduction », a déclaré le Directeur général de la FAO, Qu Dongyu.
Les éléments transmis volontairement par les pays indiquent qu’un tiers des plans d’action nationaux de lutte contre la RAM ne tiennent pas compte de l’environnement. Cela révèle combien il est important d’accompagner les pays pour qu’ils renforcent leurs mesures de prévention et de réduction de la pollution.
« La charge de la RAM peut être réduite à condition de se concentrer sur toutes ses dimensions et de travailler conjointement. Le PNUE s’est engagé à collaborer avec les États Membres et les partenaires clés, y compris les organisations de l’Alliance quadripartite, afin de lutter contre la résistance aux antimicrobiens », a déclaré la Secrétaire générale adjointe de l’Organisation des Nations Unies et Directrice exécutive du PNUE, Inger Andersen.
L’organisation mondiale de la santé (OMS) pour sa part, se réjouit des engagements pris par les pays à cette conférence. Elle appelle la communauté internationale à intensifier les actions afin de résoudre la question de RAM.
« La résistance aux antimicrobiens est l’un des défis les plus urgents et les plus complexes de notre époque, mais elle passe largement inaperçue, peut-être parce qu’elle n’est pas aussi dramatique qu’une pandémie, une guerre ou une urgence humanitaire. J’espère de tout cœur que cette réunion ouvrira des perspectives qui permettront que des engagements politiques audacieux – et concrets – soient pris lors de la réunion de haut niveau de l’Assemblée générale des Nations Unies sur la RAM en 2024. »
L’utilisation d’antimicrobiens chez les animaux a globalement marqué le pas ces dernières années estime l’organisation mondiale de la santé animale (OMSA).
« En renforçant la sûreté biologique et les pratiques d’élevage, par exemple la vaccination animale, nous pouvons tirer profit de ce succès et atteindre durablement les objectifs convenus. Réduire la nécessité de recourir aux antimicrobiens est le meilleur moyen de prévenir la résistance aux antimicrobiens », a déclaré la Directrice générale de l’OMSA, la Dre. Monique Eloit.
Moussa KEITA