Médicament : Sanofi met un terme au programme mondial de développement clinique de l’amcenestrant.

Le mois d’août est douloureux pour Sanofi. Le groupe pharmaceutique, dont l’image avait déjà souffert de ses difficultés à développer un vaccin contre le Covid-19, inquiète désormais les marchés face à une accumulation de mauvaises nouvelles.

« Sanofi met un terme au programme mondial de développement clinique de l’amcenestrant », a annoncé le groupe ce mercredi 17 août, faisant baisser son action de presque 5% à la Bourse de Paris. Cette molécule était destinée à lutter contre certains cancers avancés du sein. Mais Sanofi a pris acte d’essais cliniques insuffisamment probants.

Pour le groupe, il s’agit d’une nouvelle mauvaise nouvelle après un début août déjà plombé par une défiance sans précédent des marchés depuis plusieurs années, son titre ayant perdu plus de 15% depuis juillet dernier. Si l’image de Sanofi avait déjà pâli auprès du grand public à cause de ses retards et difficultés à développer un vaccin anti-Covid, ce sujet n’avait toutefois jamais vraiment préoccupé les investisseurs. Or, si les problèmes récents de Sanofi sont moins en vue du grand public, ils sont jugés nettement plus problématiques pour ses perspectives.

Les marchés réagissent mal à l’échec de l’amcenestrant dans un contexte où Sanofi s’était largement recentré ces dernières années sur la lutte contre le cancer, au détriment notamment du marché du diabète. Certes, contrairement à de plus petits groupes pharmaceutiques, un échec isolé ne menace pas l’avenir de Sanofi, mais il risque néanmoins de rendre le groupe moins attirant pour les investisseurs. Selon les analystes de la banque Cowen, les ventes d’amcenestrant auraient ainsi dû représenter 350 millions d’euros en 2027, à mettre en regard avec les quelque 38 milliards d’euros de revenus engrangés l’an dernier par le groupe.

Pour certains observateurs, c’est d’abord la communication du groupe qui est en cause : les mauvais résultats du traitement étaient connus depuis mars 2022, mais Sanofi ne s’est pas immédiatement résolu à l’abandonner. « Les investisseurs vont, à juste titre, douter du discours des dirigeants », remarque Wimal Kapadia, analyste pour le cabinet Bernstein, cité par l’agence Bloomberg.

Mais, plus globalement, l’échec de cet anticancéreux vient alimenter une préoccupation majeure des analystes sur Sanofi : le groupe est-il trop dépendant de son médicament phare, le Dupixent ? Ce médicament, utilisé notamment contre l’asthme et certaines maladies de peau, permet actuellement à Sanofi de voir la vie en rose avec des ventes en forte hausse. Mais le Dupixent compte désormais pour un cinquième des revenus du groupe, et les investisseurs se préoccupent de ses difficultés à développer de nouveaux traitements prometteurs.

Peu avant l’arrêt de l’amcenestrant, Sanofi avait déjà inquiété les marchés en suspendant les essais d’un traitement de la sclérose en plaques, le tolebrutinib. Il ne s’agit pas, cette fois, d’un renoncement définitif. Des problèmes graves ont été détectés chez certains patients, et Sanofi doit établir s’il y a un lien direct, avant de reprendre éventuellement les essais.

Reste que cette interruption va, à tout le moins, constituer un contretemps considérable. Et son annonce est d’autant moins bien perçue qu’elle intervient en plein regain de préoccupations sur un autre front, judiciaire cette fois.

Les investisseurs s’inquiètent en effet des conséquences financières d’un litige autour d’un traitement, le Zantac, longtemps vendu aux Etats-Unis et au Canada contre les brûlures d’estomac mais retiré du marché en 2019. Des études ont, en effet, établi que ce traitement se dégradait dans l’organisme en un composant cancérigène, même s’il n’est pas avéré qu’il ait réellement provoqué des cancers. Or, des premiers procès vont s’ouvrir ce mois d’août aux Etats-Unis, des patients accusant Sanofi et d’autres groupes d’avoir contribué à leur cancer en vendant du Zantac.

Est-ce pour Sanofi le début d’une affaire semblable à la Dépakine ? Le groupe est confronté de longue date à la justice à cause de cet anti-épileptique responsable de multiples troubles chez des enfants exposés dans le ventre de leur mère.

Il est un peu tôt pour le dire, soulignent toutefois certains analystes, qui estiment difficile d’établir un lien avec un traitement aussi ponctuel qu’un antidouleur, et pour qui Sanofi a de toute façon réagi assez vite dès les premières études préoccupantes. « L’impact éventuel nous semble aujourd’hui difficilement quantifiable », estiment les analystes du cabinet Oddo, qui jugent « excessive » la réaction des marchés.

Une bonne nouvelle pourrait toutefois arriver pour le géant pharmaceutique grâce au vaccin contre le Covid-19. Sanofi développe en effet un vaccin à protéine recombinante, qui utilise la protéine Spike (la spicule) du virus comme antigène pour aider l’organisme à le reconnaître. Sanofi, qui n’a toujours pas commercialisé de vaccin contre le Covid-19, a enregistré des résultats encourageants pour ce candidat-vaccin nouvelle génération utilisé comme dose de rappel contre le Covid-19 lors de deux essais cliniques sur ce sérum qu’il développe conjointement avec le britannique GSK, a-t-il annoncé le 13 juin.

Dans un communiqué publié le 24 juin, le groupe français a affirmé qu’une dose de rappel de son vaccin s’est révélée efficace à hauteur de 72% (intervalle de confiance entre 45,8 et 86,6%) contre les formes symptomatiques avec le variant Omicron. Chez les personnes ayant déjà eu le Covid-19 et bénéficiant donc aussi d’une immunité « naturelle », cette protection montait à 93,2% (intervalle de confiance entre 73,2% et 99,2%). Cette étude n’a toutefois pas porté sur le sous-lignage BA.5 du variant Omicron, ultra-majoritaire en France, mais l’efficacité des vaccins actuels semble similaire contre chaque sous-variant d’Omicron.

Alors que ce vaccin fait l’objet d’un examen en continu depuis juillet 2021, Sanofi a déposé une demande d’autorisation de mise sur le marché auprès de l’Agence européenne des médicaments en mars 2022.

Source : L’EXPRESS